Toriyaba

Histoire du Coton

La culture du coton à des fins de tissage pour la famille existe depuis des siècles en Haute-Volta. Chaque concession avait son champ de coton qui ne servait qu’aux besoins de la grande famille ; la récolte se faisait en famille, les femmes filaient le coton que certains hommes tissaient en bandes écrues ou parfois teintes en bleu avec l’indigo.
La vente était anecdotique.
Des fouilles archéologiques faites dans le Nord du Burkina Faso et dans les falaises de Bandiagara, ont permis la découverte de squelettes habillés d’habits de coton faits de bandes écrues tissées finement à la main.
Ces squelettes ont été datés entre le XIème et XVème siècle. La boucle du Niger recèle également des grottes avec des squelettes habillés de coton cousus (ou de laine) déjà très élaborés.
Le coton aurait été introduit à  partir du VIIème siècle, suivant la progression de l’Islam. Ils auraient suivi la migration des Peuls.

Il a fallu attendre l’arrivée des colons pour changer cette habitude familiale. La France avait un besoin urgent de coton qu’elle ne pouvait cultiver sous son climat trop tempéré ; avec l’avènement du gouverneur Hersling (1919), vint l’organisation d’une culture plus intensive avec la création de champs collectifs, appelés “les champs du commandant“. Imposés entre 1924 et 1927, les voltaïques se sont retrouvés contraints d’aller cultiver de grands champs. Cette culture forcée a provoqué beaucoup de mécontentements voire des révoltes.
A partir de 1927, les colons ont adopté une politique plus souple basée sur le modèle d’une élite.
La Haute Volta ayant été disloquée jusqu’en 1947, la culture du coton est retombée faute d’organisation et de débouchés.


Les rouleaux de coton étaient vendus et servaient de monnaie d’échange.
En 1859, Heinrich Barth signale que les Mosse fournissent le marché de Dori en bandes de coton
qui constituaient du troc avec les régions sahéliennes jusqu’à Tombouctou.

A partir de 1947, le gouvernement de la Haute Volta favorise la culture du coton non pour satisfaire les besoins de la métropole mais pour chercher des devises et permettre des emplois en zone rurale et urbaine.

En 1949, la CFDT est créée, Compagnie Française pour le Développement des Fibres Textiles. Cette compagnie a diffusé la culture cotonnière dans les pays de la zone franc en participant activement à l’augmentation du rendement des récoltes et des surfaces cultivées. Elle a en outre créé une centaine d’usines et unités de productions (savonnerie, huilerie, égrenage, production de fils de coton…).

La Haute-Volta puis le Burkina Faso se hisse au fur et à mesure des années au premier rang des producteurs de coton en Afrique de l’Ouest. Le coton fibre est exporté à l’état brut faute de moyens pour le valoriser sur place.
Dans les années 80 une usine de tissage textile s’est ouverte à Koudougou mais elle n’a pu se maintenir faute d’une gestion rigoureuse.

L’augmentation de la production et les recettes d’exportation incitent le Burkina Faso à produire toujours plus. Mais cette augmentation génère des exigences de qualité. Les cotonculteurs sont obligés de moderniser leur système de culture, ce qui revient très cher malgré l’aide technique et scientifique des pays du Nord. Les agriculteurs deviennent dépendants des sociétés d’exploitations cotonnières, en partie détenues par des actionnaires occidentaux.

Actuellement, trois sociétés cotonnières contrôlent toute la production de coton du pays. Elles opèrent chacune dans une région différente dans un total monopole : Faso coton vers Ouagadougou, la SOCOMA dans la zone de Fada n’Gourma (Est du Burkina Faso) et la SOFITEX dans le reste du pays (centralisé dans le secteur de Bobo Dioulasso.

Le coton est devenu stratégique pour le gouvernement du Burkina Faso, atteignant 60% des recettes d’exportations. La production est absorbée à 60% par l’Asie et près de 20% par l’Europe.

Le Burkina Faso est le premier producteur de coton en Afrique de l’Ouest et le 12ème au niveau mondial. sa production varie suivant les années ; en 2006 elle atteignait 760 000 tonnes , pour redescendre à 530 000 tonnes en 2010 et 464 000 en 2020. pour 300 000 cotonculteurs. Entre trois et quatre millions de personnes vivent de la culture du coton.

Certaines années les récoltes du coton du Mali ou de la Côte d’Ivoire supplantent le Burkina Faso.
Le prix réglé au producteur dépend du gouvernement et des bailleurs ; en 2020, le kilogramme de coton brut était payé 264 francs.

En 2003, le Burkina Faso signe un partenariat avec Monsanto, devenant le premier pays à utiliser le coton BT. L’intérêt de ce coton transgénique est de lutter contre le ver rose qui ravage les cultures. Le gène insecticide fut introduit dans le coton local et mis à la disposition des cotonculteurs à partir de 2008. Cette introduction a permis une augmentation significative de la production de coton.

En 2014, le Burkina Faso réunissait le plus grand nombre de producteurs d’OGM de tout le continent. 140 000 exploitants cultivaient le coton BT. Le gain atteignait 50% malgré un coût des semences très élevé. Un autre intérêt résidait dans la baisse de pesticides, l’épandage était réduit de 6 à 2.
Le revers de la médaille est vite apparu : le coton était beaucoup plus petit et de nettement moins bonne qualité. Si les producteurs n’étaient guère impactés, les compagnies cotonnières ont beaucoup perdu de profits dans cette aventure. Ces compagnies étant les distributrices des semences et intrants aux agriculteurs, ces derniers ont bien été obligé au bout de 5 ans, de revenir à la culture de coton traditionnel.

Il est clair que ces dernières années, le coton a perdu de son lustre des années 2000-2005.
La culture du coton représente 4% du PIB national et 28% du PIB agricole. Malheureusement de nombreux producteurs se retrouvent surendettés et abandonnent la filière, découragés par les contraintes dues à la modernisation de la culture et plusieurs années de pluviométrie aléatoire et d’infestations parasitaires sévères. En 2019, le ministre du Commerce de l’Industrie et de l’Artisanat a initié trois jours de réflexion sur les problèmes que rencontre la filière en vue de lui redonner son lustre d’antan.

De plus la culture même du coton est décriée par les personnes soucieuses de l’environnement car elle appauvrit les sols. Par ailleurs il est également reproché de privilégier une culture de rente au détriment des cultures vivrières alors que de nombreux paysans ne mangent pas toujours à leur faim.

Le coton bio est cultivé dans certaines régions, sa production est moindre mais il est destiné au tissage de tissus bio.

Copyright photos : A et B Chalamon, JP Fouilloux, O. Ouarma, N. Schmeltz, S. Natama

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